LEGENDES D'ALMYR: Tome 1 : Les orphelins de Sarold (French Edition) by Natcha Torres

LEGENDES D'ALMYR: Tome 1 : Les orphelins de Sarold (French Edition) by Natcha Torres

Auteur:Natcha Torres [Torres, Natcha & Torres, Natcha]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 2024-06-26T00:00:00+00:00


Chapitre 16

Le palais royal de Khéos

Dans les rues de Khéos, une sombre silhouette se frayait un chemin parmi les habitants, chose assez aisée, car ceux-ci prenaient soin de s’écarter à son passage. C’était un homme imposant, de grande taille à la démarche autoritaire. Il portait un long manteau de navigateur sous lequel se balançaient deux longs sabres dans leurs fourreaux. Lorendal Silmaro était son nom. On ne pouvait lire l’expression de son visage et pour cause, celui-ci se cachait sous un masque de métal noir aux bois de cerf. Cet objet ne se contentait pas de dissimuler le visage de son porteur, il avait aussi pour fonction d’inspirer la crainte.

Lorendal détestait les rues de Khéos. Toutes ces allées dénuées de vie, tous ces bâtiments misérables aux fissures apparentes, tous ces jardins en friche dont n’émanait jamais qu’une odeur de moisissure, ne lui inspiraient guère que du dégoût. De la même manière, il avait en horreur les habitants qui occupaient ces rues. Ceux-ci avaient la peau pâle, et les yeux injectés de sang, ils erraient comme des fantômes aux démarches mal assurées, sans buts ni convictions. Leurs regards vides n’exprimaient jamais que la crainte et la méfiance et ils étaient fixés sur Lorendal en cet instant. « Des animaux, songeait-il, des carcasses vides de couleur et de volonté. Ils me donnent la nausée. »

Si la vue de ces rues lui était si insupportable, c’est parce qu’elles n’avaient pas toujours ressemblé à cela. Elles étaient autrefois de paisibles allées pleines de vie où l’on entendait couler de claires fontaines. Les foules de passants s’y précipitaient pour assister à des pièces de théâtre, écouter des musiciens et des conteurs. Jadis, les bandes de gamins y couraient librement sur le pavé, prenant part à de riches aventures issues de leur imagination. Lorendal avait été l’un d’eux. Même en temps de guerre, songeait-il, la vie à Khéos avait été moins morbide qu’en ce jour-ci. Rien ne subsistait de cette époque, il ne demeurait plus qu’un silence austère accompagné des regards sans âmes des habitants qui n’avaient plus rien d’humain et qui se cachaient comme des rats derrière leurs volets. « Ne cesseront-ils jamais de boire cette eau ? »

La rue déboucha finalement sur une très large avenue et Lorendal en éprouva un léger soulagement. Tout au bout, il distingua l’imposant bâtiment où il devait se rendre. Autrefois resplendissant de beauté, aujourd’hui imprégné d’une aura mortelle, le palais royal de Khéos lui faisait face avec ses nombreuses tours. Lorendal était le général de l’ordre des drapeaux noirs, il allait faire le rapport de sa dernière mission.

Les gardes le reconnurent et le laissèrent passer sans dire mot. Il gravit les escaliers puis pénétra dans le grand hall d’entrée aux innombrables colonnes. Ses pas résonnèrent tandis qu’il traversa ce gigantesque espace. Si par le passé, la pièce avait pu être le symbole de toute la gloire et de toute la richesse du royaume, elle n’évoquait désormais plus que l’entre stérile d’un terrible monstre et cela n’était pas si éloigné de la vérité.

Le monstre, Lorendal n’avait guère envie de l’affronter une nouvelle fois.



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